Le centre de jeunesse de Shawbridge
- Admin
- 2 juin
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Longtemps connu sous le nom de
BOYS’ FARM de SHAWBRIDGE

« Pourquoi donc écrire sur l’histoire du Boys’ Farm de Shawbridge, maintenant devenu le Centre de la jeunesse et de la famille Bathshaw de Prévost au Québec ? Deux réponses semblent s’imposer :
d’abord à cause de son centenaire en 2007, d’une part; ensuite pour faire connaître les grandes étapes qui ont marqué l’évolution de cette institution vouée au bien-être d’une certaine jeunesse anglophone du Québec. Enfin aussi pour rendre hommage à tous ceux et celles qui ont contribué au rayonnement de cette institution depuis plus d’un siècle maintenant. »
(Ainsi s’exprime Marcel Beaudet, dès lespremières lignes de son livre sur le « Boys’ Farm » qu’il a fait paraître à l’automne 2007).
J’ai eu le plaisir de rencontrer personnellement monsieur Beaudet et de l’écouter me résumer son travail. Pendant plusieurs années, il fut parmi les enseignants sur ce Campus; il en parle avec chaleur et générosité. Pendant ce temps, en plus de son implication auprès de ces jeunes, il a eu la possibilité de recueillir détails, informations et photos qui lui ont servi, la retraite venue, pour mener à bien son projet littéraire. L’histoire est fascinante, quand on s’y arrête un peu.
« Le tout commence au début du 20e siècle, même avant. Dès 1899 l’idée d’avoir une ferme à la campagne dans les Laurentides, pour venir en aide aux jeunes garçons contrevenants, avait été suggérée par James R. Dick, alors surveillant au Boy’s Home de Montréal. À cette époque, les jeunes francophones (en difficulté) bénéficiaient déjà depuis plus de 40 ans d’une institution appropriée. Les jeunes anglophones avaient donc un retard à rattraper dans ce domaine. Un premier terrain de 250 acres fut acheté à H.G. Goodfellow de Shawbridge en 1907 pour la somme de 8 500 $. On organisa une levée de fonds afin de défrayer les coûts de construction d’un premier « cottage », lequel allait abriter le personnel et les premiers pensionnaires.
Dès octobre 1908, c’est l’ouverture officielle en présence d’un grand nombre de visiteurs venus de Montréal pour l’occasion. Ainsi naquit le Boys’ Farm à Shawbridge qui se voulait assez révolutionnaire : il n’y avait ni clôtures ni barrières et les jeunes vivaient dans des cottages. Les travaux sur la ferme et les études allaient occuper la plus grande partie de la journée. Georges Matthews en fut le premier directeur pendant neuf ans et y laissa sa marque.
Pour mieux comprendre le contraste de la nouvelle façon de faire, voyons un peu : On rapporte que le premier groupe de pensionnaires, une quinzaine de garçons venant de la prison de Sherbrooke, arrivent à la ferme menottes aux poings et sous bonne escorte de la Police provinciale. Un deuxième groupe en provenance de Montréal, arrivant un mois plus tard, fait réaliser à la direction qu’il faudra déjà penser à agrandir le cottage existant. Mais en attendant, on applique le programme de réhabilitation : les jeunes pensionnaires doivent accomplir certaines tâches ménagères telles l’entretien du bâtiment, la lessive, l’aide à la cuisine etc. Les plus âgés veillent aux soins des animaux de la ferme et aux moissons sous la surveillance d’un fermier. L’enseignement des matières académiques est assuré par M. Thompson, assistant du directeur pour un beau 10 $ par mois, pension et logement inclus.

Les dix premières années ont été particulièrement trépidantes. Le premier tribunal de la jeunesse a été créé à Montréal en 1912; cela a eu pour effet d’augmenter rapidement la population du Boys’ Farm. De 43 qu’ils étaient en 1911, on en compte 133 en 1919.
Au cours des années qui suivent, on procède à l’érection de nouveaux édifices : une école primaire, une école de métiers, un hôpital, une chapelle, un gymnase; le tout prend l’allure d’un petit village grâce à la générosité de l’élite anglophone de Montréal, par ailleurs bien représentée au conseil d’administration.
La ferme continue de s’agrandir; ainsi en 1919, on fait l’acquisition d’une ferme adjacente de 200 acres comprenant tous les bâtiments de ferme dont une maison où logera un groupe de jeunes pendant quelques temps.
Mais l’expansion de l’institution ne s’arrête pas là. En 1930, on fait œuvre de pionniers au Canada en instaurant un programme d’aide offrant une ambiance familiale. Les cottages seront dorénavant sous la surveillance d’un couple de « parents ». Au nombre des activités offertes aux jeunes, on ajoute l’enseignement jusqu’à la 8e année, un corps de cadets, une gamme variée de sports, tout en poursuivant l’initiation à l’agriculture et à l’élevage. C’est au cours de ces années que fut établie « la journée de l’agriculture », à laquelle participent les jeunes, fiers de montrer leurs animaux de race.
La turbulence des années 60 se fait sentir au Boys’ Farm. Les « parents » furent remplacés par des éducateurs spécialisés et le nombre de jeunes par cottage fut réduit à douze. Et à la fin de l’année 1968, on abandonna l’agriculture et le travail sur la ferme. Une nouvelle ère prenait naissance. À la demande du Ministère des Affaires sociales, on admit les filles au centre, pour la première fois en 1976. Ce nouveau mandat mena au changement de nom en 1977, en celui de : Les centres de jeunesse Shawbridge, appellation visant à refléter la clientèle mixte et à rappeler le caractère polyvalent de l’établissement. On se servit de l’ancienne chapelle (bâtiment historique construit en 1923 avec l’aide d’un don de la famille Molson) pour loger une de ces unités de détention afin de répondre aux besoins d’une clientèle particulière. Ce bâtiment existe toujours, mais les modifications apportées semblent démontrer un manque flagrant de souci de conservation d’un bien historique, en plus d’être un affront à la famille Molson et aux fondateurs du Boys’ Farm ».
… et nous voilà en 2007
« Le site enchanteur qui entoure le Campus de Prévost a peu changé depuis 100 ans. Les champs sont encore là mais la nature a repris peu à peu ses droits. La plantation d’arbres qui avait remplacé l’exploitation des champs agricoles a été abandonnée depuis quelques années. Il ne reste que des fondations encore visibles des magnifiques bâtiments de ferme qui jadis faisaient partie du quotidien des gens de la région. Les vastes terrains avoisinants le Campus sont malheureusement devenus la convoitise de promoteurs immobiliers depuis quelques années.
Marcel Beaudet, retraité du Boys’ Farm
Grands remerciements à monsieur Beaudet pour sa collaboration à notre bulletin. Jacqueline Dumas, v.p. de la S.H.G.P.H.
LM-106-16
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