top of page

Lac Guindon : les souvenirs d’Andy Billingsley

  • Photo du rédacteur: Admin
    Admin
  • 19 juin
  • 9 min de lecture

Dernière mise à jour : 21 juin

Comment ma famille est arrivée au Lac Guindon


Pour les montréalais, les Laurentides offraient de grands espaces, avec l’air frais des montagnes qui faisait oublier l’air vicié de la ville en plein essor industriel. On voulait donc sortir les enfants le plus tôt possible de l’école et déménager la famille à la campagne pour l’été.


La communauté des lacs Marois et Guindon, qui s’était développée autour de l’agriculture depuis les années 1850, était relativement isolée et voyait d’un très bon œil l’arrivée des estivants à qui ils pouvaient vendre des terres, construire des chalets, fournir le transport et vendre des produits frais de la ferme.

C’est ainsi qu’en 1909, à l’âge de 35 ans, mon grand-père Fred Poliwka visite avec des amis le lac Marois, où sont établis plusieurs anglophones. Il tombe en amour avec la région, mais trouve le lac déjà trop peuplé et lui préfère le lac Guindon, encore sauvage. Le 23 août 1909, en partenariat avec G.E. Decatur, il conclut avec Annas Hébert, propriétaire de la terre, l’achat d’environ la moitié de la rive sud du lac, au prix de 300 $.

Ainsi débutait une histoire d’amour qui dure maintenant depuis plus de 100 ans entre la famille Poliwka-Billingsley et le lac Guindon !


Je vous présente ma famille

Fred était le gérant de la succursale montréalaise de Toronto Pharmacal Co. Ltd, qui vendait au comptoir des médicaments sans prescription, comme par exemple du poison à acariens et de l’huile de foie de morue qui faisait faire la grimace aux enfants.


Son père Emil avait immigré d’Allemagne et sa mère Charlotte Billingsley était issue de la famille d’un loyaliste américain qui s’était réfugié au Québec en passant par la Gaspésie, puis Québec avant de se fixer à Montréal. En 1921, un arrêté en Conseil permettait à Fred et à ses deux frères de changer leur nom de famille pour le nom de leur mère, Billingsley, plus discret que Poliwka, nom allemand, mal vu après la première guerre…

La famille vers 1914 dans les marches de la Big House : Fred, Gertrude, Gordon, Dorothy, Winston et Beatrice.
La famille vers 1914 dans les marches de la Big House : Fred, Gertrude, Gordon, Dorothy, Winston et Beatrice.

Fred et Gertrude (Gran) ont eu 5 enfants : Gordon (1904), Dorothy (1907), mon père Winston (1909), Beatrice (Blue) (1911) et George (1917). Je suis né en 1939, mon frère John en 1941 et mes sœurs, Charlotte et Margie en 1944 et 1946.


Les années 1910 et 1920

En 1910, Fred, Gertrude et les enfants Gordon, Dorothy et le bébé Winston (mon père) emménagent donc dans un beau chalet tout neuf qu’Annas Hébert leur avait construit. C’était une grande maison identique à la sienne, contenant cinq chambres sur deux étages ; même la bécosse était grande, avec deux sièges ! C’est la maison qu’on a toujours appelée Big House et qui est encore là aujourd’hui. Seul l’escalier avant et le mât sont disparus ; si le drapeau était monté, c’est qu’il y avait quelqu’un à la maison. Annas, né en 1882 à Saint-Sauveur, avait marié Malvina Guindon, une famille pionnière du secteur. Aujourd’hui, leurs descendants Louis et Michel Hébert sont toujours actifs dans cette communauté.


Au début, le terrain était dénudé ; on y a planté plusieurs pins qui sont maintenant majestueux. Avec le temps, on a ajouté un abri à bateaux, puis mon oncle Gordon a construit un petit chalet utilisé l’hiver par les skieurs. Évidemment, il n’y avait ni électricité, ni téléphone, ni eau courante ; par contre, on avait installé un câble qui descendait jusqu’au lac et qui, avec une poulie, permettait à partir d’en haut de descendre une chaudière et de la remonter pleine d’eau… quand ça marchait ! La vie était belle ! On passait les journées dans l’eau et sur l’eau, à pêcher, ou dans la forêt, en explorations ou à chasser le lièvre.

Les voisins riverains étaient à l’ouest, J.A. Shinnick, de Shinnick Ice and Cartage à Montréal, et du côté est, le docteur F.C. Nichol, un dentiste de Montréal. Les trois utilisaient la route d’accès à la ferme


de Gilbert Paquette, qui était un peu plus loin que chez les Nichol. Ce dernier fournissait la glace, le lait et les légumes frais ; en contrepartie, la famille Poliwka-Billinsgley leur donnaient les vêtements devenus trop petits et qui convenaient toujours à au moins un des 15 enfants Paquette…


En 1917, les deux co-propriétaires (Fred et G.E. Decatur) se divisent la propriété, dont certaines parties avaient déjà été vendues. Fred conserve environ cinq acres contiguës au terrain des Shinnick qui subdivisera plus tard son terrain pour ses trois filles, dont les maisons avaient des toits respectivement bleu, jaune et vert.


Avec le temps, la famille s’est agrandie. Beatrice, en 1911 ; on l’a toujours appelée Blue à cause de ses beaux yeux bleus. Puis George est né en 1917. Alors âgé de 4 ans, il est frappé de la fièvre scarlatine ; mon père Winston, âgé de 12 ans, est dépêché à pied pour trouver un médecin à Shawbridge. Ses efforts demeureront vains et George ne survivra pas à la scarlatine.


L’accès au lac Guindon était un problème. Il n’y avait pas beaucoup d’autos et une première route de gravelle jusqu’à Saint-Jérôme ne sera ouverte qu’au début des années 1920. Il fallait donc demander de venir nous chercher à la gare du CPR à Shawbridge, passer la rivière du Nord sur le pont à péage Shaw, puis prendre une route jusqu’aux lacs Guindon et Marois. Mais comme Shawbridge n’était finalement qu’à 5 kilomètres, on pouvait aussi s’y rendre à pied, d’où la naissance du Lumber Trail.


La Big House en 1910. Assis au premier plan, Fred et ses fils Gordon et Winston (mon père).
La Big House en 1910. Assis au premier plan, Fred et ses fils Gordon et Winston (mon père).

Andy Billingsley devant La Big House en 2013.
Andy Billingsley devant La Big House en 2013.

À l’arrivée de mon grand-père Fred en 1909, la communauté anglophone du lac Marois était déjà bien développée. On y célébrait déjà des messes dans un lieu temporaire, puis la Lac Marois Union Church a ouvert ses portes en 1911. Le Lac Marois Boating Club a été créé en 1910 et Fred en devint vice-président en 1914. Le rapport de 1915 mentionne les activités sociales suivantes : la première fête sociale le 10 juillet, la régate annuelle le 7 août, une fête sociale avec distribution des prix le 14 et le pique-nique annuel le 21.

Les années 1930

En 1933, un membre de la famille de ma grand-mère Gertrude, un menuisier d’Angleterre, passe l’été au lac et on en profite pour construire un bungalow plus près du lac ; on doit aménager une piste abrupte pour descendre les matériaux depuis la Big House. Mon père Winston ralentit ses recherches doctorales en biochimie à McGill et vient donner un coup de main. La famille occupera dorénavant ce bungalow et la Big House, qui vient d’avoir l’électricité, sera louée.

Le bungalow en 1934 : grand-maman Gertrude en avant, mes tantes, Dorothy dans l’escalier et Beatrice à la fenêtre.
Le bungalow en 1934 : grand-maman Gertrude en avant, mes tantes, Dorothy dans l’escalier et Beatrice à la fenêtre.

À cette époque, le ski de randonnée était devenu très populaire, en grande partie à cause de Herman Jack Rabbit Smith-Johannsen, qui demeurait à Shawbridge. C’est lui qui avait tracé la piste Maple Leaf qui allait de Shawbridge à Labelle, en passant par l’ancienne Lumber Trail et en traversant le lac Guindon juste en face de la propriété ; c’était aussi un sentier très populaire pendant l’été.


En 1940, après la fin de semaine de l’Action de grâces, mon grand-père Fred revient à Montréal en train avec sa fille Beatrice. Embarqué à Shawbridge, une valise dans chaque main, il parcourt le train pour trouver une place. Entre deux wagons, alors que le train amorce un virage, il perd l’équilibre, est projeté à l’extérieur et meurt instantanément. Comme j’étais né peu avant, Fred alors âgé de 75 ans avait eu le temps de voir une nouvelle génération de Billingsley qui allait continuer l’histoire d’amour avec le lac.

Les années 1940 et 1950

L’occupation des chalets

Après la guerre, c’est la seconde génération qui occupe les chalets, à l’exception de Gordon, qui s’est marié et qui est allé s’établir en Colombie-Britannique en 1925.


Blue, qui enseigne à Montréal, s’installe dans le bungalow avec sa mère, Gertrude (Gran). Elles reçoivent beaucoup d’amis ainsi que Tom Dennison, le frère de Gran, et son épouse Peggy. Gran adore le lac, son jardin et son environnement. Elle a même insisté pour aller y passer, seule, son 80e anniversaire, en 1957.


La famille de Dorothy demeure à Montréal ; ils ont déjà trois enfants et ils occupent la Big House.


Comme plusieurs à cette époque, ils n’ont pas d’auto et c’est un ami de David, Pringle Seath, qui les véhicule.


La famille de Winston, établie à Ottawa, déménage pour trois ans à Montréal en 1946 et il n’y a plus assez de place dans la Big House pour la famille de Dorothy et la nôtre. On transforme alors le chalet de ski en cottage, en subdivisant la grande pièce et en ajoutant une cuisine et une galerie, et c’est la famille de Dorothy qui l’habitera.


Mon père Winston prendra la Big House. N’ayant pas d’auto non plus, c’est Ernest Hébert qui chaque été allait chercher et reconduire à Montréal les parents, les quatre enfants et une nanny, avec un des taxis qu’il opérait avec son frère Aimé. Quand ma famille retourne vivre à Ottawa, des amis nous prêtaient une auto pour aller au lac, jusqu’à ce que nous en ayons une en 1952.


La vie au lac

Nos deux familles, celle de Winston et celle de Doro- thy, étaient très unies et faisaient tout ensemble, sou- vent avec les amis Tabah et Desrosiers, qui demeu- raient à proximité. Il y avait même assez de monde pour faire deux équipes de baseball et on avait fabri- qué un grillage arrière avec de la broche à poule. On avait aussi fabriqué un jeu de tetherball (spiroballe) et c’est Gran qui crochetait des sacs où l’on enfermait une balle de tennis. Nous jouissions aussi d’un quai, des chambres à air et de trois chaloupes pour nous rendre à la plage à l’extrémité est du lac. Nous, les gars, on portait encore des costumes de bain de laine qui avaient cette petite odeur caractéristique lorsque mouillés… et ils restaient mouillés longtemps ! Les deux mères avaient leur anniversaire en été, ce qui nous fournissait autant d’occasions de plus pour faire la fête.


Les parties de cartes, comme le Canasta, étaient très populaires ainsi que les jeux de Clue et de Parchési. Les plus jeunes allaient cueillir des bleuets et des framboises pour les tartes que ma mère Isabel faisait cuire dans le poêle à bois. Les jeunes aimaient aussi faire griller des guimauves et faire sauter du pop-corn sur le BBQ de pierre. On passait des heures à jouer à l’école avec notre cousine Anne comme professeure. Quant à nous les garçons, nous partagions une activi- té secrète et bien sûr défendue : on se faisait des ci- garettes avec du papier de toilette et des aiguilles de pins qu’on appelait des bumwados.

Certains soirs, quand on avait le courage de marcher jusqu’au Country Club du lac Marois, on pouvait y voir un film de cowboy ou une comédie. Une autre attrac- tion était aussi le juke-box de l’Auberge du Gros Sa- pin dont la musique se répandait dans l’air du soir tout autour du lac ; dans les années 1940, la chanson qui jouait le plus souvent était Peg O’My Heart, par les Three Suns.


Les petits travaux

Il fallait monter des chaudières d’eau à partir du lac, ramasser du petit bois, couper et fendre des bûches, vider les ordures dans la fosse à détritus. L’eau chaude venait d’un réservoir attenant au poêle à bois, lequel était utilisé pour toutes les cuissons. Un des garçons Paquette venait deux fois par semaine avec sa voiture à deux roues tirée par un cheval remplir notre glacière de glace enrobée de bran de scie.


À tous les jours, on allait voir s’il y avait du courrier au bureau de poste qui, au début, était dans la maison privée des Guindon, puis, pendant plusieurs années, au magasin de Lucien Bourbonnais (les deux étaient en face du BMR actuel), où on pouvait s’acheter des Popsicles et des cornets de crème glacée. Tout le monde surveillait le tri du courrier et attendait l’appel de son nom.


On allait aussi acheter de la viande et des produits frais chez Filiatrault (maintenant le dépanneur Boni- soir). Mais on préférait acheter les fruits et les lé- gumes que monsieur Gauthier venait vendre chaque semaine avec son gros camion, dont on entendait le gros klaxon à chaque fois qu’il faisait un arrêt le long du chemin.

Les années 1960 et suivantes


Gran décède en 1961, après 50 étés passés au lac. Elle venait de séparer la propriété en trois parties pour ses trois enfants vivant dans l’est du pays.

Tante Dorothy conserve le cottage. Devenue veuve, elle vend sa propriété en 1969 à un monsieur Boucher, qui détruit le cottage et sépare le terrain en trois. En 1971, elle déménage à Vancouver où vivent ses trois enfants. Winston a la Big House et Blue le bungalow ; elle décide elle aussi, en 1971, de déménager en Colombie- Britannique et vend à Winston.


Mon père Winston devient donc l’unique propriétaire des terrains et bâtiments de la famille et il m’y installe ainsi que mes sœurs Margie et Charlotte, tous les trois mariés et demeurant à Ottawa. Son autre fils, mon frère John, est céli- bataire, vit à Ottawa et n’a pas d’auto. Il n’a jamais beaucoup fréquenté le lac.


En 1968, nous avons acheté un des chalets pour touristes qui avaient été installés à proximité de l’Expo 67 et qu’on vendait 1 000 $; il est arrivé sur un fardier et on l’a monté près de la Big House. Ma sœur Charlotte et son mari habitaient le bungalow et mon autre sœur Margie partageait la Big House avec les parents.


Les équipements nautiques de la famille incluaient alors un voilier GP 14, un radeau et un canot Chestnut. On joue encore à la spiroballe et aussi au croquet tout-terrain, une invention des Billingsley. Les excursions au belvédère sur les falaises en arrière de Shawbridge sont aussi populaires.


En 1986, mon père me vend le bungalow pour 1 $. La famille, qui grandit, apprécie le plus grand espace. Charlotte déménage alors dans le cottage de l’Expo. En 1988, c’est Margie qui achète la Big House, pour un autre 1 $. Ma sœur Margie et moi sommes encore aujourd’hui propriétaires des deux propriétés.


LM-127-22

 
 
 

Posts récents

Voir tout

Comentarios


À PROPOS

La Société d'histoire et de généalogie des Pays-d'en-Haut est une corporation sans but lucratif

ADRESSE

Tél. : (450) 744-0182

 

Chalet Pauline-Vanier 

33, avenue de l'Église
Saint-Sauveur, Québec, Canada
J0R 1R0

 

info@shgph.org

Voir les heures d'ouverture

POUR NE MANQUER AUCUNE NOUVELLE. 
ABONNEZ-VOUS MAINTENANT!
  • Grey Facebook Icon
  • Grey Google+ Icon
  • Grey Instagram Icon

© 2017-2024 Mélanie Tremblay / Votre boutique en ligne : faites le premier pas

bottom of page