L’artisan-menuisier
- Mélanie Tremblay
- 2 sept.
- 3 min de lecture
Rencontre avec Arthur Millette
Arthur Millette est né le 13 avril 1931. Sa mère, Herméline Lajeunesse, enceinte et voyant le temps d’accoucher, s’en fut à Sainte-Adèle demeurer quelque temps chez son frère barbier, où s’y trouvait un médecin accoucheur. L’année suivante, suite à une deuxième grossesse, Herméline décède (1932). Son père, Roméo, était alors âgé de 20 ans. Vers 1934, Roméo se marie à nouveau à Saint-Sauveur avec Berthe Bélisle (1913-1954) de Morin-Heights. Ils auront 8 enfants, dont 4 vivants : René, Raymond, Rita et André. Ensuite, un troisième mariage avec Lucienne Morel, originaire de Lachine, mariage à Val-Morin, qui durera 24 ans.
Originaire de Sainte-Adèle, son grand-père, J. Émery Willie Millette (1887-1969) est arrivé avec son épouse Victoria Bélair (1883-1965) vers 1917. Roméo a déjà 6 ans. Le couple aura 7 enfants, dont 4 vivants : Roméo, Roger, Cécile et Lucie. Le patois préféré de Willie était... calvin ! D’où son appellation parfois dans les archives. Il était de grande stature (5 pieds 11 pouces) pour l’époque, ossu et pesant, trappeur réputé dans la région. Il trappait les bêtes avec des pièges en automne et en hiver. Il capturait des visons, de la loutre, du castor et du rat musqué. Pas de renard. Un vison se vendait environ 30 $ ou 40 $. Exceptionnellement, une fois, il vendit un vison au prix de 80 $. Un marchand, monsieur Singer de Sainte-Agathe, achetait les peaux. À l’été, les peaux étaient offertes à l’encan de la Compagnie de la Baie d’Hudson de Montréal. Elles étaient ensuite revendues sur le marché européen. Le revenu d’un trappeur était avantageux comparé à celui des bûcherons qui gagnaient environ 10 $ par mois, nourris et logés.

Son fils Roméo était habile au travail du bois. Vers l’âge de 20 ans, il devint menuisier et construisit des maisons ainsi que portes et châssis. Un travail tout fait à la main, avec des outils simples, l’égoïne, le rabot, la varlope, le niveau, l’équerre, le marteau, le tournevis, le vilebrequin, le trusquin, « car les moteurs au gaz sont arrivés bien après ma naissance. Les outils électriques sont arrivés vers 1950; ma première scie ronde à main était de marque japonaise Makita », me raconte son fils Arthur. Vers les années 1940, Roméo a aussi travaillé au moulin à scie d’Aldéric Bellefleur. Le père Édouard Bellefleur a obtenu sa terre gratuitement, soit le lot 2, rang V, le 18 mai 1891, car il avait 12 enfants, dont Aldéric l’aîné, tous originaires de Saint-Sauveur. Aldéric s’est marié 2 fois, et eut 7 enfants dont Édouard II, l’aîné, « surnommé Taupin ». Ils étaient parents avec notre curé Filion de l’époque.
Le fils Arthur Millette fréquentera l’école du village située sur le site de la mairie actuelle. Cette école avait remplacé la première école brûlée en 1924, située sur le même lot, au pied de la côte. Il a commencé à fréquenter l’école à l’âge de 7 ans jusqu’à la 9e année, dernier degré enseigné. Puis, à 16 ans, ce fut l’apprentissage du travail de menuiserie avec son père, déjà établi. Ils travaillèrent ensemble pendant 40 ans, à construire des maisons, des meubles, des portes et châssis. « Nous avons élevé quelques cochons et quelques poules pour nos besoins, mais pas longtemps. Nous pouvions acheter notre nourriture auprès des trois épiceries du village, la viande de porc, de bœuf ou le poulet, et les autres produits de nécessité ».
Les premières maisons étaient bâties sur un solage en bloc de ciment. Puis on construisait le plancher, la charpente en bois, murs et divisions. Pas d’eau courante. Les sanitaires, qu’on appelait : les bécosses (back house), étaient dehors. Comme on n’avait pas toujours la pompe à eau, souvent l’eau était apportée à la chaudière tirée au puits alimenté par une source, ou au ruisseau le plus proche. Les comptoirs étaient en bois, et l’évier en fonte émaillée blanche. Le poêle à bois répandait sa chaleur par des ouvertures ou trappes dans les pièces du 2e étage.
Toutes étaient recouvertes de toits en tôle que l’on se procurait à Sainte-Agathe. Et malgré tout, l’hiver si froid pénétrait dans les maisons sans châssis doubles ni isolation. Les toits n’étaient jamais enneigés dû à la perte de chaleur. Les fenêtres se couvraient de glace qui suintait jusque sur les murs. Nous portions des bas de laine tricotés par les femmes. Les propos s’enchaînent sur les souvenirs de la petite école, ce qui fera l’objet d’une prochaine chronique village...
Sources : Archives de la Société d’histoire et de généalogie des Pays-d’en-Haut, Le Présent du Passé, par Corbeil, Gratton et Guilbert, Édition numérotée 90, 1983/.

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