La nordicité : Qu’est-ce au juste ?
- Admin
- 2 juin
- 3 min de lecture
Qu’est-ce donc que cette nordicité devenue un sujet d’actualité disons « brûlant » ?

En premier lieu, il faut savoir que nous sommes dedans depuis notre naissance, comme Obélix était tombé dans la potion magique. C’est d'abord un fait qui nous environne, notre lieu d’enracinement. Mais le mot est un néologisme qui a été inventé il y a plus de 35 ans par un géographe et linguiste de chez nous de renommée internationale, Louis-Edmond Hamelin, professeur émérite de l’Université Laval et fondateur du Centre d’études nordiques de cette université à Québec. Il serait plus exact de dire que monsieur Hamelin a « mis au monde » ce mot tout neuf, vu que la chose existait déjà dans une réalité plus que virtuelle et que, c’est à souligner, le mot était aussi en puissance dans le génie de la langue française. Voilà pourquoi cet éminent intellectuel s’est mérité, en plus d’innombrables prix et décorations, le beau titre populaire de « père de la nordicité ».
C’est en observant la trop lente pousse des carottes dans le potager familial, à Saint-Didace de Maskinongé, que le jeune Hamelin a fait une constatation primordiale qui devait orienter ses études et sa réflexion futures. « Si les carottes poussent si lentement par ici, avait-il conclu, c’est parce que notre pays, c’est le Nord ! » Une brillante carrière universitaire s’en est suivie qui nous a donné, entre autres œuvres savantes, nombreuses et reconnues internationalement, Nordicité canadienne qui lui a valu le prix du Gouverneur général en 1976.
Il faut compter au moins 500 mots nouveaux, authentiquement de chez nous qu’il a « inventés » « créés » ou « fait naître » de façon légitime dans la langue française pour décrire le nord, le froid, la neige, la glace, les extrêmes saisonniers, les courants atmosphériques et marins et leurs nombreuses variantes que nous connaissons et observons au fil des jours d’hiver partout au Canada, pays qu’il a parcouru en tous sens et autant que possible à pied.
Or, voilà le hic ! Ces mots n’existent pas dans les dictionnaires français, du moins pas encore. Car ceux-ci n’ont de mots que pour décrire leurs Alpes, ce qui est déjà quelque chose, mais n’exprime pas toutes les conditions géographiques et climatiques particulières que l’on rencontre au Canada. Les skieurs qui ont pratiqué leur sport dans les deux pays peuvent témoigner de ces différences. Seul le mot « nordicité » a jusqu’à ce jour fait une timide entrée dans le Larousse 1993…
Revenons à la réalité de la nordicité, car le mot répond à une idée qui a mis quatre à cinq ans à mûrir avant de naître comme tel dans la tête de son père. « Ma conception de la nordicité, dit le professeur Hamelin, comprend cinq éléments : d’abord le mot, bien sûr; c’est ensuite un espace, la limite sud du nord comme région qui a ainsi été définie pour la première fois (par moi) ; c’est également une période (l’hiver) avec ses aspects chronologiques, saisonniers et temporaires. Mais c'est surtout un élément qui interpelle le mental chez l’humain à partir de la réflexion (sans la nordicité mentale, j’aurais manqué mon coup). Enfin, c’est un programme d’action, un mouvement qui pousse à l’action ». Il ajoute plus loin : « La nordicité exprime l’état de nord, qu’il soit perçu, réel ou vécu, pourvu que l’on demeure à l’intérieur de l’hémisphère boréal ». (Québec, Canada, grandeur nature, janvier-février 1999).
Que voilà tout un programme ! En résumé, la nordicité, c’est un lieu donné avec ses caractéristiques propres. La nordicité, c’est aussi une façon de penser et d’agir par rapport à ce lieu. Sommes-nous des nordistes ? Je me propose de causer de cela avec vous dans un prochain article.
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